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05.09.2016

Cession de dette, de créance ou de contrat: Le changement c’est maintenant pour votre société !

Au 1er octobre 2016, les 359 articles « nouveaux » du Code Civil issus de la réforme du droit des contrats devraient, sauf cataclysme, entrer en vigueur.

La réforme a indéniablement des conséquences sur les problématiques de droit des sociétés, renforçant notamment l’efficacité des pactes d’actionnaires et modifiant le régime des cessions-reprises d’entreprise. Nous nous concentrerons ici sur certaines opportunités que peuvent ouvrir les nouveaux contrats de cession (de créance, de dette, de contrat) au moment de la création puis au cours de la vie d’une société.

(Reprise de notre article paru dans ECODOCS21 N°594 du 2 septembre 2016)

Cession de contrat et reprise des actes accomplis au nom d’une société en formation

En vertu de l’article L210-6 du Code de commerce, il est possible aux fondateurs de la société de faire reprendre par la société, dès après son immatriculation, les actes qu’ils ont accomplis avant la signature des statuts. La reprise des actes permet de substituer rétroactivement à la personne qui a passé l’acte (au nom de la société en formation) la société nouvellement immatriculée. En revanche, lorsque les créanciers demandent à l’associé signataire (au nom de la société en formation) de s’engager en qualité de caution de la société, la reprise par la Société ne libère pas l’associé signataire de son engagement de caution.

Le mécanisme de la cession de contrat, qui sera introduit au 1er octobre 2016 au nouvel article 1216 du Code civil pourrait permettre au dirigeant fondateur, dès après l’immatriculation de la Société, de demander au créancier de le libérer pour l’avenir de son engagement de caution, le créancier pouvant néanmoins conserver deux débiteurs s’il le souhaite. Il ne faudra néanmoins pas oublier formellement de soumettre le contrat conclu au nom de la société en formation et contenant une clause de cession de contrat à la procédure des conventions conclues entre le dirigeant et sa société !

 

Des pistes d’optimisation financière et fiscale au sein des groupes de sociétés

Si chaque société au sein d’un groupe est une personne morale autonome, l’utilisation des nouveaux mécanismes de cession de dette ou de contrat sera susceptible d’ouvrir de belles opportunités d’optimisation, sous réserve que les contrats en cause contiennent des clauses autorisant par avance la cession.

La politique au sein des groupes pourrait désormais être d’inclure une clause dans les contrats clients autorisant la filiale à céder le contrat à l’une des sociétés du groupe… ou la mère à céder le contrat à ses filiales.

Ainsi, une société mère, qui normalement n’a pas qualité pour agir judiciairement au nom de la filiale, pourra assigner en justice le cocontractant d’une de ses filiales. De même une société mère pourra céder sa qualité de partie au contrat à la filiale concernée. Une filiale en difficulté pourrait aussi céder une dette immédiatement exigible à la société mère.

Fiscalement, la cession de contrat pourrait également être une piste pour tenter de surmonter la non déductibilité des aides à caractères financier interentreprises : une société mère pourrait ainsi consentir à sa filiale une aide à caractère commercial (et non simplement financier) en devenant cessionnaire du contrat déficitaire conclu par sa filiale.

La cession d’entreprise à réinterpréter à l’aune de la cession de contrat

Le mécanisme de la cession de contrat permet de légaliser la pratique (audits d’acquisition) et la jurisprudence qui renforçaient considérablement l’obligation d’information à la charge du vendeur. On imagine aussi bien l’opportunité pour un repreneur d’entreprise qui souhaiterait remettre en cause son acquisition d’affirmer que la cession de contrôle est une cession du contrat de société ou de position sociétaire.

Par ailleurs, il est probable que le mécanisme de la cession de créance permette de faciliter les cessions de titres de sociétés en difficulté (le mécanisme de la cession de créance ouvrant la possibilité de s’affranchir de l’exigence de détermination du prix comme condition de validité, ce qui n’est pas le cas avec le mécanisme de la vente).

Il nous appartiendra donc dès le 1er octobre 2016 d’exploiter les opportunités, espérons-le pertinentes, ouvertes par la réforme du droit des contrats.

En matière de cession de fonds de commerce, le régime de cession de contrat risque néanmoins de complexifier la rédaction puisqu’il vaudra à peine de nullité formaliser l’accord des parties quant à la poursuite par le cessionnaire de l’exécution des contrats souscrits par le cédant… avec tous les risques que cela comporte en matière de renégociation.

 

Béatrice LERAT

Avocat au Barreau de DIJON

 

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