Prévenir le risque de mésentente entre associés
Si lors de la constitution d’une société, les associés font preuve d’un minimum d’entente, en revanche, au cours de la vie sociale, les intérêts des associés peuvent fortement diverger et conduire à une mésentente grave de nature à paralyser le fonctionnement de la société durablement.
Ce risque est d’autant plus élevé que le capital est réparti égalitairement entre deux associés ayant tous les deux le pouvoir de gestion comme cela se voit trop souvent au sein de SARL comportant deux associés cogérants égalitaires.
Dans ce cas, les statuts sont souvent insuffisants. Il peut donc être intéressant pour les associés de prévoir dans un accord contractuel entre associés – le fameux pacte d’associés – la conclusion de clauses spécifiques relatives TANT à la situation de blocage ponctuel qu’à celle de mésentente persistante entre associés.
Des clauses spécifiques pour anticiper le risque de blocage entre associés :
Ainsi, les associés peuvent dans le pacte anticiper le blocage des décisions de gestion courante par la désignation d’un membre extérieur choisi pour ses compétences professionnelles et son indépendance. Il conviendra de préciser les pouvoirs de ce tiers arbitre ainsi que les nouvelles règles de majorité applicables au sein de l’organe de direction de la société. Le tiers arbitre pourra accomplir sa mission aux côtés des organes déjà existants comme se substituer pour une durée déterminée aux organes sociaux de direction.
On peut également convenir que chaque groupe d’associés désignera un tiers arbitre et que les deux arbitres désignés choisiront un troisième arbitre afin d’assurer collégialement une gestion provisoire de la société.
Se sortir définitivement d’une situation de crise entre associés :
En cas de mésentente persistante et irréductible, le mode de gestion provisoire fixé dans le pacte sera inefficace. La solution consistant à obtenir une dissolution judiciaire de la société est insatisfaisante car incertaine, coûteuse et irrémédiable. Il convient donc au cas par cas, d’insérer des clauses de sorties adaptées à de telles situations de mésentente.
Avant de solder une mésentente grave entre deux associés, une clause texane dite aussi « clause de shot gun » peut être mise en place afin d’éliminer l’un des deux associés. Le principe est simple. L’associé qui décide de faire jouer cette clause propose à l’autre associé de lui racheter sa participation dans le capital de la société à un prix déterminé. L’associé à qui l’offre est faite n’a que deux choix :
– Accepter purement et simplement de vendre au prix proposé par le premier associé ;
– ou refuser de vendre, ce refus étant assorti de l’obligation de racheter la participation de son associé au prix que ce dernier lui avait lui-même proposé.
De même une clause d’offre alternative à enveloppes fermées pourrait être mise en œuvre en cas de mésentente grave entre associés : nos deux associés se proposent mutuellement de se racheter leur participation respective dans le capital de la société. Celui des deux associés qui a émis la proposition la moins disante est alors dans l’obligation de céder sa participation au prix offert par l’autre associé.
D’autres clauses sont envisageables. Cela est d’autant plus vrai qu’un pacte d’associés est soumis à une très grande liberté contractuelle. Le pacte permettra donc de s’adapter au maximum aux risques prévisibles (dans le respect de la loi) et permettra d’aménager au mieux les conditions d’une rupture entre associés.
Cet article est une reprise de notre article paru le 5 mai 2011 dans le Bien Public
©Béatrice LERAT
Avocat
LERAT AVOCAT – Partenaire en Droit des Affaires et Fiscalité
Mots-clefs : accord, actionnaire, affaires, arbitre, associé, blocage, capital, clauses, constitution, contentieux, levée de fonds, mésentente, mésentente entre associés, pacte, pacte d'actionnaires, pouvoir de gestion, SARL, SAS, société