Le passage au vert du bail commercial
Dans la foulée de l’engouement pour le développement durable, le « vert » a reçu une consécration législative via en particulier les Lois Grenelle I et II. La loi Grenelle II (qui doit être suivie de près de deux cents décrets !) a d’ores et déjà abouti à la mise en place de deux mécanismes s’agissant des baux commerciaux connus sous les noms de code de DPE et de bail vert.
S’il ne s’agit que d’outils informatifs purement incitatifs… – du moins à ce stade – les contraintes liées au futur de ces mesures se profilent déjà à l’horizon. Raison de plus pour réfléchir dès aujourd’hui afin d’optimiser ce « coloriage en vert » du régime actuel du bail commercial…
LE DIAGNOSTIC DE PERFORMANCE ÉNERGÉTIQUE (DPE)
Le DPE tel que résultant de la Loi Grenelle II a pour but d’évaluer les performances énergétiques des locaux y compris commerciaux[1] et de proposer des recommandations destinées à l’amélioration de cette performance. Modifié notamment par les arrêtés du 8 février 2012 et du 18 avril 2012 afin de le clarifier et de le rendre plus fiable, le DPE devra à compter du 1er janvier 2013 préciser les émissions de gaz à effet de serre de l’immeuble en cas de constructions ou d’extension de bâtiments.
Ce DPE nouveau (dont il existe quatre modèles distincts en fonction de la nature du bien) n’a encore à ce jour qu’une valeur simplement informative. D’ailleurs le DPE est encore non opposable et aucune sanction expresse n’est prévue par la loi en cas de non communication du DPE ou d’un DPE erroné (des actions sont néanmoins envisageables tant au plan civil que pénal).
L’ANNEXE ENVIRONNEMENTALE (BAIL VERT)
Ce document doit être joint aux baux portant sur des locaux de plus de 2 000 m² à usage de bureaux ou de commerces conclus ou renouvelés à compter du 1er janvier 2012. Quand aux baux en cours, ils devront intégrer la partie « bail vert » dès le 14 juillet 2013.
Dans le cadre de cette annexe, le locataire et le propriétaire devront se communiquer mutuellement toutes informations utiles relatives aux consommations énergétiques des locaux loués. Le locataire permettra au propriétaire d’accéder aux locaux loués pour la réalisation de travaux d’amélioration de la performance énergétique et environnementale des locaux. Cette annexe pourra prévoir les obligations qui s’imposeront aux locataires pour limiter la consommation énergétique des locaux concernés.
IDÉES DE CLAUSES A INSÉRER POUR VERDIR ET SÉCURISER SON BAIL COMMERCIAL
Parce que ces nouvelles contraintes imposent d’adapter la rédaction actuelle des baux commerciaux, les points suivant nous paraissent essentiels
- La répartition des coûts preneur – bailleur
Pour pouvoir faire supporter au preneur le coût des travaux liés aux mises en conformité avec les nouvelles réglementations, des clauses particulières et précises devront être insérées. A défaut, dans le silence du bail, les travaux imposés par les nouvelles réglementations – d’un montant qui peut être très important – resteront à la charge du bailleur en vertu d’une jurisprudence constante de la Cour de cassation.
- Les dérogations éventuelles à l’obligation de délivrance devront être expressément précisées, tant côté preneur que bailleur, et pour toute la durée du bail, concernant toutes les réglementations issues de la loi Grenelle II de l’environnement.
- L’état des lieux, la surface des lieux loués et les travaux ayant permis une progression dans la performance énergétiques des lieux loués seront au cœur du bail et nécessiteront toute l’attention des parties et des rédacteurs.
DES COUTS…ET DES AVANTAGES
Même si ce passage au vert engendre des coûts, le bailleur comme le locataire peuvent y trouver un avantage quant à une meilleure anticipation des coûts et de la gêne liés aux travaux à réaliser, l’anticipation de la répartition de la charge d’un éventuel impôt sur la performance énergétique, la réduction à terme des charges de l’immeuble, l’amélioration des environnements de travail…et à plus long terme la valorisation du patrimoine du bailleur.
cet article est une reprise de notre article paru pour l’Ordre des Avocats au Barreau de DIJON dans écoplus du 30 août 2012
Béatrice LERAT
Avocat
[1] Seules certaines catégories de bâtiments sont hors du champ d’application du DPE : les constructions provisoires, les bâtiments d’une surface de moins de 50 m², agricoles ou industriels où le chauffage produit une faible quantité d’énergie par rapport à celle nécessaires aux activités économiques…)