Comment protéger l’entreprise en cas de départ d’un salarié-actionnaire?
Le facteur humain est la première richesse d’une entreprise, a fortiori technologique. En donnant aux salariés l’accès au statut d’actionnaire, il est possible de doper les performances de l’entreprise. Il convient néanmoins d’adopter des clauses adéquates afin de sécuriser l’entreprise dans l’hypothèse où la relation salariée prendrait fin.
L’actionnariat salarié facteur de croissance pour l’entreprise
Il n’est pas rare que les cadres deviennent actionnaires de la société les employant.
Le législateur s’est même penché récemment sur la question : La loi MACRON portant réforme de l’actionnariat salarié a ainsi eu pour ambition affichée de redynamiser la mise en œuvre de deux dispositifs d’actionnariat salarié : les attributions d’actions gratuites et les bons de souscription de parts de créateurs d’entreprise (BSPCE).
En pratique, il n’est pas rare que plusieurs années de collaboration au sein de l’entreprise soient requises avant que le salarié ne puisse devenir actionnaire. Surtout, il convient d’organiser dans les statuts les modalités précises d’acquisition de la qualité de salarié actionnaire, les règles de fonctionnement et de séparation applicables… afin de sécuriser les intérêts de l’entreprise.
La clause d’exclusion – une protection imparfaite et contraignante en l’espèce
La clause d’exclusion est une clause qui est en effet peu adaptée en cas de perte de la qualité de salarié. Il vaut donc mieux la réserver à d’autres cas de cessions d’actions forcées. Elle est ainsi adaptée pour des cas tels qu’une infraction à la Loi ou aux statuts, un acte de concurrence déloyale ou une mise en redressement ou liquidation judiciaire de l’actionnaire.
Ce type de clause est assez contraignant: pour être licite, la procédure et les modalités d’exclusion (pour motif grave) doivent être décrites. Il convient également de prévoir quel organe prononcera cette exclusion. Si c’est l’assemblée générale qui est compétente, il conviendra aussi de prévoir les conditions de quorum et de majorité applicables et la possibilité pour l’actionnaire dont l’exclusion est envisagée de voter et de se défendre.
L’on comprend donc la lourdeur de la mise en œuvre de cette clause… et donc la nécessité pour l’avocat de rédiger deux clauses : l’une d’exclusion, pour les cas les plus graves, et l’autre plus simple à mettre en œuvre, qui permettra de contourner aisément l’exclusion en cas de départ de l’entreprise d’un salarié actionnaire.
La solution : faire du salarié un actionnaire à durée déterminée
Dans un arrêt du 29 septembre 2015, n°14-17343, la Chambre Commerciale de la Cour de Cassation vient de juger qu’est licite la clause des statuts d’une société anonyme qui prévoit que les actionnaires salariés perdent la qualité d’actionnaire lorsqu’ils cessent d’être salarié, tout en donnant au conseil d’administration la possibilité d’en autoriser le maintien.
En effet, dans cette espèce, le salarié, en devenant actionnaire, s’était engagé à respecter la règle selon laquelle la propriété des actions était indissociable de la qualité de salarié : le salarié ne pouvait donc ignorer la précarité de sa qualité d’actionnaire. L’éviction automatique qui en résultait en cas de perte de la qualité d’associé ne pouvait donc pas être confondue avec une exclusion, laquelle était par ailleurs prévue par les statuts. Le salarié devait donc dès la fin de son contrat de travail céder ses actions. En outre, la Haute juridiction précise que cette clause ne confère pas au conseil d’administration un pouvoir discrétionnaire d’exclusion, mais seulement la faculté d’autoriser un salarié actionnaire à demeurer actionnaire lorsqu’il quitte la société.
L’insertion d’une clause d’éviction statutaire permet donc, sauf exception, de procéder automatiquement à l’éviction de l’actionnaire salarié qui perd la qualité de salarié, indépendamment de la cause de la fin du contrat de travail (démission, licenciement, rupture conventionnelle, départ à la retraite)… les modalités financières, confidentielles par essence, étant elles réglées par un pacte.
Pacte d’actionnaires et modalités financières de sortie
Pour les salariés actionnaires exerçant des fonctions de direction, il est courant d’organiser dans un pacte les modalités de détermination du prix de rachat des parts ou des actions. L’on prévoit alors des clauses de bad leaver (lorsque le prix des titres est affecté d’une décote , par exemple en cas de licenciement) ou de good leaver (lorsqu’une prime est prévue, par exemple lorsque les résultats obtenus dépassent les objectifs fixés).
Cet article est une reprise de notre article paru dans ECODOCS21 n°561 du 15 janvier 2016
Avocat au Barreau de DIJON
LERAT AVOCAT – Partenaire en Droit des Affaires & Fiscalité
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